Un minerai d’enfer qui devrait réveiller la conscience des observateurs lointains !
Au nom de la transition économique, doit-on accepter l’inacceptable ?
Le mois de mai prochain, la France verra fleurir de nombreux ponts symboles des jours sans travail. Loin de chez nous, au Congo, sans compter leurs heures, des hommes creusent des puits sans eau dans les cours ou au cœur même des habitations, transformant la terre en véritable gruyère.
C’est la gorge encore piquante que je relaye la vérité brute sur la nouvelle vie des Congolais de Kolwezi. Cette population supporte l’enfer pour tenter de simplement survivre. Leur quotidien ? Extraire des sous sols sans aucune sécurité et au détriment de leur vie, le fameux or noir nécessaire à la fabrication des batteries de nos chères voitures électriques.
Le dimanche 21 avril 2024, mes yeux de téléspectateur ont découvert l’intolérable. Aux alentours de 19h, le magazine présenté par Harry Roselmack avait proposé un reportage sur les mines de cobalt à Kolwezi au sud du Congo, d’où sort 70% de la production mondiale. Dans cette région, des centaines de milliers de Congolais risquent leur santé et leur vie pour prélever ce minerai. Ces mineurs descendent dans un dédale de galeries et triment sous plus de 40 degrés, à des profondeurs où l’air vient à manquer. Ils bravent le danger bien réel de finir ensevelis sous l’argile en cas d’éboulements. Joseph a 43 ans. Il souffre d’un genou qu’il s’est abîmé au fond d’un trou de fortune, mais il continue à travailler pour subvenir aux besoins vitaux de sa famille. « Le soir quand il rentre, c’est toujours un soulagement » confie son épouse. L’un de ses fils prie pour Joseph, tandis que ce père s’interdit de promettre à son épouse son retour au bercail. « Quand tu sors le matin de chez toi pour aller au boulot, tu n’as pas le droit de dire à ta femme qu’on se reverra le soir, tout peut arriver », confirme l’un de ses collègues.
En effet, l’homme doit chaque jour descendre plus de vingt mètres dans une sorte de puits sans échelle ni corde, prenant soin de ne pas tomber sur ses deux collègues, puis ramper dans un tunnel de fortune, passant sous des blocs de roches de plusieurs tonnes. L’argile friable rendant chaque opération dangereuse. L’homme prend des risques démesurés pour un salaire de misère. Joseph et ses compagnons ne gagnent que 7 euros en moyenne par jour, pour dix heures de travail. Même pas 1 euro de l’heure ! Une fois le cobalt extrait, les mineurs passent par un comptoir d’achat installé dans les mines, dont le patron est un Chinois. Sur 119 comptoirs que compte la région, 106 sont en réalité tenus par des chinois. Un monopole qui étrangle ces damnés du cobalt soumis à des barèmes de prix critiquables, inéquitables mais non négociables. Ce sont des forçats dans un monde loin d’être un modèle de modernité et d’égalité.
Cette transition écologique censée préparer l’avenir nous renvoie plutôt au Germinal du passé !
À proximité des mines qui n’ont de cesse de grossir, des familles se font expropriées par les exploitants dénués de scrupules et de gants. Germaine et son mari ont perdu une maison dans laquelle ils vivaient depuis 30 ans. « Les Chinois sont venus à la maison, ils nous ont demandé de partir en disant que cet endroit avait été vendu », ont-ils expliqué. En échange de la somme de 50 000 euros, le couple a dû démolir, brique après brique sa propre maison et investir un autre logis sans eau courante ni électricité…
L’exploitation de cette frénésie minière rime également et tristement… avec la pollution. Les Congolais vivant à proximité des bassins d’acide sulfurique nécessaires à la transformation du cobalt, ont vu leurs ressources se détériorer : l’eau de la rivière ne peut plus être utilisée, les poissons l’ont fuie, les choux et le manioc sont attaqués. De nombreux enfants présentent des malformations congénitales comme des becs de lièvre, des encéphalites ou des atrophies des membres…
Au Congo, selon les Nations Unies, 40 000 enfants travailleraient dans des mines de cobalt. A l’image de Christian, 6 ans, qui chaque jour, harangué par sa mère, martèle des pierres dans la montagne de résidus d’un géant minier. A l’âge où nos petits d’homme jouent et apprennent, cet enfant … travaille malgré la poussière, sous un soleil implacable et sans la garantie de pouvoir manger le soir.
Pour ces enfants loin de chez nous, le travail de forçat est devenu leur école de la vie et le marteau, leur stylo pour l’écrire !