Depuis un demi-siècle, le Boss, véritable héros de la culture américaine, raconte son pays comme personne.
Cette icône du New Jersey, accompagnée de sa guitare, chante des combats brûlants et présente au monde le vrai visage de l’Amérique. Empruntant à Elvis Presley, le langage du corps et à Bob Dylan la tonalité musicale et les mots du cœur, sa plume acérée est la mémoire d’un pays qui s’est construit dans la douleur au gré des vagues d’immigration. Les USA, c’est une histoire d’exodes ; celle d’un peuple qui n’a jamais hésité à partir à la recherche d’un monde meilleur !
Nourri aux influences du cinéma, de la littérature et du Rock’n’roll et partageant avec les cinéastes du nouvel Hollywood des années 70, des sujets faisant voler en éclat le rêve américain, le Boss est devenu le porte-drapeau d’une nation avec un titre devenu cultissime.
“Born in the USA” ! Sa rencontre fortuite dans un motel avec Ron Kovic, vétéran du Vietnam défendant la paix en fauteuil roulant dont le film “Né un 4 juillet” d’Oliver Stone conte l’histoire avec Tom Cruise pour interprète, est à l’origine de ce succès planétaire. Une déclaration d’amour chantée dans 62 villes de par le monde, en une seule année et pour un public de 14 à 45 ans. Une folie ! Pour la petite histoire, le titre lui a été inspiré par un scénario que lui avait soumis Paul Schrader. Le scénariste de “Voyage au bout de l’enfer / Deer hunter” et le réalisateur de “Blue Collar”. Bruce a d’ailleurs pompé le look du personnage joué par Robert De Niro dans “Deer Hunter”. L’acteur lui rendra la pareille en improvisant la scène culte de “Taxi driver” avec un “You talking to me” emprunté au Boss alors qu’il assistait, dans un club New Yorkais, à une de ses représentations en compagnie du réalisateur Martin Scorsese. Avec ce tube stratosphérique, Bruce Springsteen devient le nouveau héros américain et la figure messianique que son pays attendait ! Sa récupération par les républicains et Georges Bush a copieusement indigné son penchant démocrate.
“Street of Philadelphia” ! Le Boss a 45 ans en 1993 quand il accepte pour la première fois de collaborer à la réalisation d’un film : “Philadelphia” de Jonathan Demme. Bien lui en a pris puisqu’il obtient l’oscar de la meilleure chanson pour ce film culte qui a changé le regard des gens sur le crabe mortel de l’époque : le SIDA !
Bruce et le cinéma, c’est une histoire d’amour réciproque. Il s’inspire des films pour ses chansons et ses chansons inspirent des films. “L’art et la culture façonnent la société parce qu’ils parlent à l’esprit des gens. Ça les aide à bâtir leur monde idéal, leur personnalité, la personne qu’ils veulent être dans la culture qui les entoure”.
“The ghost of Tom Joad” ! La Ballade de Tom Joad sortie en 1995 est une référence au personnage principal du roman de John Steinbeck de 1939, “Les raisins de la colère”. Dans son album, Springsteen transmet ses visions quant aux difficultés de l’ère Clinton, où la fortune est loin de trouver tout le monde.
“Highway Patrolman” ! Ce titre tiré de l’album Nebraska inspire Sean Penn pour la réalisation de son film “Indian Runner” et l’album lui-même trouve sa source dans le premier film de Terrence Malik intitulé “Badlands” (Balade sauvage) avec Sissy Spacek et Martin Sheen. Le thème de la violence paroxysmique et de la nature sauvage sont au centre de cette œuvre dans laquelle Bruce puise pour donner naissance à une fable de 4 minutes ! Selon le critique musical William Ruhlmann, “Nebraska” est « l’un des albums les plus difficiles jamais sortis par une grande star sur une grande maison de disques ».
“The rising” ! Le 11 septembre 2001, le symbole de la toute puissance de l’Amérique s’effondre sous les yeux du monde. Un fan apostrophe l’artiste en ces termes : “Eh boss, on a besoin de toi !”. Un an plus tard sort son album de la résilience pour se relever de ce drame encore présent dans tous les esprits. Le Boss offre même un morceau au parti démocrate qui en fait un hymne de campagne ! En 2009, davantage investi en politique, Bruce accompagne Obama et donne une nouvelle valeur à sa chanson “The rising”. Obama lui confère mieux qu’un grade. En vertu de son nouveau pouvoir, il l’adoube : “Aujourd’hui, je suis le président. Mais lui, c’est le Boss !”
“We take care of our own” ! Plus fracturée que jamais, la société américaine a besoin d’unité et le Boss le sait : “Il y a un tout petit groupe de personnes qui a détruit la vie des autres. Des gens ont perdu leur maison, leur retraite et personne n’a jamais rendu de compte pour ça !”. En 2012, indigné par cette impunité, les dégâts engendrés et plusieurs années de dureté économique, il chante ce qui peut s’apparenter aux fleurs fanées du rêve américain.
Sans renfort de publicités, cette icône révoltée a multiplié tout au long de sa carrière des actes de générosité envers les banques alimentaires et les associations caritatives contre le racisme. Il a toujours été convaincu que “ce que le rock fait de mieux, c’est d’apporter la liberté !”. L’enfant prodige du New Jersey aux valeurs ouvrières chevillées au corps n’a jamais eu besoin de projecteurs pour chanter ses peurs, ses colères et ses indignations.
Comme dans un road movie sans fin, celui qui se rêvait à 15 ans en fils spirituel d’Elvis et de Bob, né d’un père irlandais et d’une mère italienne, continue d’écrire son grand roman américain.
Connaissez vous une personnalité française qui chante et parle aussi profondément et sans filtre du pays qu’il aime plus que lui-même ?